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Attac78Nord
12 juillet 2005

Le web et le débat sur la constitution européenne en France

 


Le web et le débat sur la constitution européenne en France

 

Les analyses concernant le résultat du référendum sur la constitution européennes continuent d’affluer et nombre d’entre elles soulignent, sans pouvoir en mesurer précisément l’importance, le rôle tenu par le Web dans l’issue du scrutin. L’étude dont nous présentons ici quelques faits marquants est née d’une envie de vérifier cette idée que nous avions que le débat pour le non avait essentiellement lieu sur le Web.

Nous avons pour cela lancé une exploration à grande échelle de la « partie » du Web traitant du référendum. Cela consiste à envoyer sur la toile plusieurs dizaines de robots qui rapatrient dans une base de données les contenus des sites (textes, images, fichiers) ainsi que les liens hypertexte entre les sites. Une loi scientifiquement validée sur de grandes échelles énonce que les sites qui traitent des mêmes sujets sont proches en terme de liens (en nombre de clics). Nous avons donc aspiré plus de 12 000 sites et 2 500 000 pages en prenant comme points de départ une dizaine de sites traitant du référendum. Cette aspiration s’est déroulée entre le 30 Mai et le 1er Juin 2005. Notre objectif était d’avoir une vision surplombante du débat politique sur le Web et de comprendre comment celui-ci s’organisait en terme de relations entre les sites.

Parmi nos 12 000 sites, plus de 6000 étaient en langue anglaise et ne furent pas analysés. Les 5000 sites restant ont dans un premier lieu été traités informatiquement. Ne furent sélectionnés que ceux qui comportaient des mots ou expressions en rapport avec le débat, soit un millier de sites. Sur ces 1000 sites restant, seulement 295 traitaient réellement du débat, nous les avons classés en sites du oui, sites du non, sites ne prenant pas position, sites des institutions (sénat, commission européenne…) et sites des grands médias (Libération, Le nouvel observateur…).

Le premier constat vient du net déséquilibre entre sites du oui (79) et sites du non (161) soit 67% contre 33%. L’émission Arrêt sur image du 10 Avril 2005 après comptage effectué sur les trois principales chaînes hertziennes révélait que plus de 70% du temps de parole consacré au débat l’était par des hommes politiques favorables à la constitution européenne. Le Web a servi de tribune publique à nombre de ceux qui se sentaient écartés des plateaux de télévision ou des grands médias transformant ainsi en quelque sorte le Web en un « négatif » de la télévision.

oui non

La représentation sous forme de graphe de nos sites et des liens hypertextes les reliant a permis d’étudier l’organisation « hypertextuelle » des deux camps. Nous avons ainsi révélé que les deux camps étaient remarquablement structurés sous la forme de communautés compétitives. Le terme de communauté en analyse des réseaux sociaux s’applique à un ensemble d’objets possédant plus de liens entre eux qu’avec l’extérieur. C’est la communauté du non qui est la plus dense mais aussi d’une certaine façon la plus fermée ; en effet 79% de ses liens sont intra-communautaires contre 64% pour le oui. Autrement dit cela signifie qu’un site du non ne propose en moyenne qu’un lien sur cinq vers un site qui ne soit pas du non. Le site du oui, lui, en propose deux.

S’il est vrai que l’on mesure souvent sur le Web l’importance d’un site au nombre de visites qu’il reçoit, on peut aussi -et c’est en partie ce sur quoi repose la technique de classement du moteur de recherche google- mesurer cette importance au nombre de fois qu’un site est cité par d’autres sites, aux nombres de « chemins » qui peuvent mener l’internaute sur ce site. On parle alors du statut d’autorité d’un site. Nous avons cherché à savoir quels étaient les sites qui « faisaient autorité » sur notre domaine. Nous n’avons pas été étonné de trouver au premier rang de nos autorités des sites d’information et premier parmi tous le site du journal Libération. Cependant Libération n’était pas suivi d’autres sites de journaux ou de chaînes de télévision mais par deux médias d’information « alternatifs » que sont www.rezo.net et surtout www.acrimed.fr, l’observatoire (très) critique des grands médias. Autre point intéressant, parmi les 10 premières autorités du oui et du non confondues, 8 appartiennent au camp du non, on retrouve le site de la fondation Copernic de Yves Salesses, celui du nouvellement célèbre Etienne Chouard. Les deux autorités du oui présentes dans ce « top ten » sont le site des amis du oui (www.lesamisduoui.com) et le site du oui socialiste (www.ouisocialiste.net).

oui politique Le débat sur la constitution a eu entre autre pour effet de bouleverser l’échiquier politique et les habituels clivages de parti. Après la victoire du non, une des questions récurrentes était de savoir de quel type était le non exprimé : un non de gauche, un non d’extrême gauche, un non de révolte, un non xénophobe. Effectuer une cartographie des sites de partis politiques ayant pris parti pour le oui ou pour le non donne des éléments de réponse à cette question complexe. La carte politique du oui comporte seulement 39 sites et parmi ces 39 seuls 10 représentent l’engagement de l’UMP pour le oui. Cependant on remarque un effort fait par deux sites du oui pour structurer et rassembler le oui et ainsi donner une certaine consistance au domaine sur le Web. Il s’agit du site www.lesamisduoui.com appelant au rassemblement des partis politiques oeuvrant pour le oui et du site www.ensemblepourleoui.com faisant la même chose mais pour les associations. Ces sites se sont positionnés comme fédérateurs de cette petite galaxie en prenant le rôle de passerelles entre les sites.

non politique Du côté du non, on retrouve 74 sites de partis politiques et ces sites se situent à gauche pour 30%, à l’extrême gauche pour 39% et appellent à un vote unitaire de toute la gauche pour 13% d’entre eux. Le non sur le Web est donc sans conteste un non de gauche et ceci à plus de 82%. On retrouve seulement deux sites de l’extrême droite (FN et MNR), sites qui ne sont d’ailleurs pas reliés aux autres sites. Enfin les 14 restants se partagent entre sites souverainistes de gauche (Jean Pierre Chevènement), souverainistes de droite (MPF et CPNT) et des sites de partis militant pour un renouveau social du Gaullisme.

Une fois ces grandes tendances dessinées, il est possible d’analyser les données recueillies dans une approche qualitative, nous pourrions par exemple étudier la position centrale dans nos cartes du site d’Etienne Chouard, site qui était quasiment inconnu avant qu’il n’y propose son texte de décryptage de la constitution et qui a eu au plus fort du débat plus de 30 000 visites par jour. De même, la représentation de nos données sous forme de cartes a permis de révéler le rôle de passerelle entre le monde de l’extrême gauche et celui de la gauche du site www.democratie-socialisme.org, site de Gérard Filoche, ce constat appelle des interprétations qui dépassent le cadre de notre travail. Enfin, nous avons noté la situation des institutions (sénat, commission européenne…) comme beaucoup plus proche du camp du oui en termes de liens que de celui du non.

Au sein du groupe RTGI (Réseau Territoires et Géographie de l’Information) de l’Université de Technologie de Compiègne, nous travaillons à la reconnaissance du statut expérimental du Web comme terrain de sondage. Devant la complexité des protocoles de collecte des données, nous savons nos résultats dépendants de notre méthode et des outils mobilisés mais la voie est maintenant ouverte et ceci depuis une étude similaire réalisée aux Etats Unis par des chercheurs du laboratoire HP et parue il y a 3 mois au sujet de la dernière campagne présidentielle. Cette étude portait sur la blogosphère et avait révélé une plus grande densité de liens entre les blogs républicains qu’entre les blogs démocrates, elle avait aussi montré la très nette préférence des blogs républicains pour les informations véhiculées par la chaîne Fox News.

Ce type de travail de photographie permet d’archiver et de stabiliser un milieu extrêmement plastique et mouvant tel que l’est le Web. Ces photographies, nous l’appelons de nos vœux, peuvent devenir à terme un outil d’interprétation et d’analyse pour des chercheurs en sciences humaines, dans ce cas précis politologues ou sociologues.





                                                                                                               
Liens   orientésouinonindépendantsinstitutionsmediasTotal (out)
oui15941131025248
non33432232037545
independants81101929
institutions1072132355
medias75451132
Total (in)2174964249105909
Liens orientés entre les catégories de sites.
Exemple : Il existe 13 liens du "oui" vers les indépendants et 8 liens les indépendants vers le "oui".

oui non

Contact : Franck Ghitalla
Centre Pierre Guillaumat
UTC BP60319
60200 Compiègne

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